26 février 1917 : l’enregistrement du premier disque de jazz

A l’époque le mot jazz ne s’écrivait pas avec deux Z comme l’émission Banzzaï de Nathalie Piolé sur France Musique mais avec deux « S ». Des « s » qui nous rappelle que l’une des nombreuses étymologies proposées pour le mot jazz est par exemple le mot jaser ou encore jackass que l’on peut traduire par "l’imbécile, l’abruti". C’est dire la réputation légère et même sulfureuse que traîne, au départ, cette musique de danse qu’on retrouve dans les bars et les maisons closes. Un style nouveau qui fait donc une entrée remarquée le 26 février 1917 dans un studio new-yorkais réservé en temps normal à la musique classique…

Les heureux élus sont quatre musiciens blancs de La Nouvelle-Orléans. Ils jouent du cornet à piston, du trombone, de la clarinette, du piano et de la batterie, ils se nomment Dominic James dit « Nick » La Rocca, le leader du groupe, Edwin B. dit « Eddie » Edwards, Lawrence dit « Larry » Shields, Henry Ragas et Anthony ou plutôt Tony » Sbarbaro. Ils ont entre 19 et 27 ans et forment l’Original Dixieland Jazz Band. Un quintette qui passera bientôt au cinéma , qui deviendra la formation de danse la mieux payée au monde et l’une des plus célèbres grâce à ce 78 tours sorti le 8 mars 1917 et écoulé à plus d’un million d’exemplaires en l’espace d’un an !

Graver les deux faces de ce disque ne fut pas une mince affaire ! En effet, comment restituer au mieux l’énergie de ces musiciens habitués à jouer dans des lieux très bruyants sans faire saturer les micros d’un studio réservé aux formations classiques de musique de chambre ? Après plusieurs enregistrements test, l’ingénieur du son du studio est obligé de placer les musiciens à différentes distances du micro à pavillon. La batterie de Sbarbaro est installée derrière le cornet de La Rocca lui-même installé à environs 6 mètre du micro. Et le résultat est assez bluffant !

Si cet enregistrement est considéré comme étant le premier disque commercial de jazz de l’histoire il faut tout de même rappeler qu’il existe des enregistrements en fait plus anciens de musiques considérées comme jazz. Dans un article du Monde, le journaliste Francis Marmande rappelle d’ailleurs qu’entre 1897 et 1917 on ne dénombre en fait pas moins de trente enregistrements de blues ou de ragtime, des cylindres personnels ou plus confidentiels et qui firent en tout cas beaucoup moins de bruit que celui de l’Original Dixieland Jazz Band !