La situation en Nouvelle-Calédonie Depuis le début de la semaine, la Nouvelle-Calédonie est plongée dans une crise sécuritaire, identitaire et politique, sur fond de révolte contre une réforme constitutionnelle controversée visant à élargir aux personnes résidant depuis dix ans dans l'archipel le corps électoral, figé depuis l'accord de Nouméa de 1998. Après les émeutes, les pillages et les incendies de dizaines d’entreprises, ce territoire français du Pacifique sud est désormais placé sous le régime de l'état d'urgence décrété par le gouvernement mercredi soir. Le retour à l'ordre est un "préalable à la poursuite du dialogue" et "permettra de garantir l'approvisionnement de l'île en produits essentiels", a affirmé le Premier ministre Gabriel Attal.
Jusqu’à mardi, les auditeurs se montraient plutôt critiques sur le traitement médiatique des événements en Nouvelle-Calédonie, notamment au sujet de la réforme du corps électoral. Ils regrettaient le manque d'explications détaillées sur le contenu de cette réforme et son impact, ainsi que l'absence de diversité des voix et de perspectives dans les sujets. Certains critiquaient le sensationnalisme et le manque de profondeur dans l'analyse des événements.
A partir du milieu de la semaine, le constat a été celui d’une couverture journalistique plus informative et équilibrée, mettant en lumière les enjeux et les implications de la réforme en question, afin de permettre une meilleure compréhension de la situation aux auditeurs.
Nous proposons dans cette Lettre
une sélection des sujets relatifs à la situation en Nouvelle-Calédonie traités par les rédactions avec des décryptages, de la contextualisation et de l’analyse.
Samedi, lors du rendez-vous de la médiatrice sur Franceinfo, à 13h20 et 16h20, Florent Guyotat, directeur adjoint de la rédaction, répondra aux questions des auditeurs qui s'interrogent sur le traitement médiatique de la situation en Nouvelle-Calédonie. L'approche éditoriale de la rédaction sera évoquée, notamment sur les enjeux de la réforme du corps électoral. Concernant les experts sollicités et les différents invités, nous verrons comment Franceinfo a fait intervenir une diversité de voix afin d'assurer l'équilibre et l'objectivité dans la présentation des faits.
Guillaume Meurice Nous avons reçu de nombreux messages au sujet de Guillaume Meurice. Revenons sur les faits : le 28 avril dernier, dans l’émission « Le Grand Dimanche soir » sur France Inter, l’humoriste a réitéré ses propos polémiques sur Benjamin Netanyahou. Fin octobre, il avait comparé le Premier ministre israélien à une "sorte de nazi mais sans prépuce", formule qui lui avait valu des accusations d’antisémitisme. Les auditeurs avaient été très nombreux à réagir et à nous écrire. La direction de Radio France avait alors adressé un avertissement à Guillaume Meurice, pour avoir refusé de formuler un mot d’apaisement. Nous avons analysé cette séquence
dans l’édito de la Lettre du 17 novembre 2023.
A la suite de nombreuses saisines, l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, a également adressé à l’automne une mise en garde relative à cette séquence, une décision rare pour une séquence humoristique. Voici un extrait de la décision :
« l’Autorité, tout en réaffirmant l’importance qui s’attache à protéger la liberté d’expression des humoristes, estime que la chronique en cause, dont les risques de répercussions sur la cohésion de notre société ne pouvaient être ignorés, tout particulièrement dans un contexte marqué par la recrudescence des actes à caractère antisémite, a porté atteinte au bon exercice par Radio France de ses missions et à la relation de confiance qu’elle se doit d’entretenir avec l’ensemble de ses auditeurs. » Début mai, quatre jours après avoir répété sa plaisanterie dans l’émission dominicale de Charline Vanhoenacker, Guillaume Meurice a été mis à pied à titre conservatoire (sans privation de salaire) en prévision d’un entretien disciplinaire.
Depuis sa mise à l'écart de l'antenne nous recevons un abondant courrier dans lequel les auditeurs expriment leur déception et leur inquiétude. Ils soulignent l'importance de la liberté d'expression et de la satire à la radio et regrettent la suspension d’antenne de Guillaume Meurice qu’ils perçoivent comme un affaiblissement de l'audace. Certains insistent sur l’importance de maintenir un esprit de controverse et d'irrévérence, et appellent à préserver la diversité et la richesse des voix sur France Inter.
Certains mentionnent le classement sans suite d’une plainte de l'Organisation juive européenne et d'Avocats sans frontières pour "provocation à la violence et à la haine antisémite et injures publiques à caractère antisémite", classée sans suite par le parquet de Nanterre en avril. Ce volet pénal ne revient pas pour autant sur la mise en garde de l’Arcom ou l’avertissement reçu par Guillaume Meurice de la part de son employeur Radio France, les deux volets de l’affaire étant de registres très différents.
Guillaume Meurice a été convoqué ce jeudi à un entretien avec les ressources humaines de Radio France. La direction de Radio France n’est pas en mesure à cette date de communiquer auprès des auditeurs sur les motifs ni la suite de la procédure, en respect de celle-ci toujours en cours.
Changements de grille Les changements de grille à la rentrée prochaine suscitent également beaucoup de réactions de la part des auditeurs de France Inter.
« La Terre au carré » Les auditeurs expriment leur attachement profond à l'émission "La Terre au carré" et s’inquiètent de son évolution annoncée. Ils soulignent l'importance de cette émission dans un contexte d'éco-anxiété et de désinformation, la considérant comme un service public vital pour relayer des idées, des initiatives et des réflexions sur l'environnement et la science.
De nombreux auditeurs louent la qualité de l'émission, le travail de Mathieu Vidard et de Camille Crosnier, ainsi que leur capacité à rendre accessibles des sujets complexes et à susciter l'intérêt du public. Certains expriment leur scepticisme face à l'annonce de modifications à venir, appelant à la préservation de l'âme de l'émission et à la continuation de son format actuel pour sensibiliser efficacement les citoyens sur les enjeux environnementaux et scientifiques.
En réponse aux messages reçus, la direction de France Inter précise qu’à la rentrée, la chaîne proposera une émission quotidienne consacrée à l'environnement et à la science. Une réflexion, entre Mathieu Vidard et la direction, est en cours sur ce futur programme, notamment en intégrant davantage de récits. Comme toute antenne, France Inter évolue constamment, effectuant des ajustements pour offrir des contenus innovants et exigeants.
Camille Crosnier, qui a grandement contribué à « La Terre au carré » sera présente à l'antenne tous les jours pour présenter "Les P'tits Bateaux". Par ailleurs, des discussions ont lieu pour d'autres projets éditoriaux.
« La Librairie francophone » Des auditeurs expriment leur incompréhension face à la suppression de "La Librairie francophone" sur France Inter. Ils soulignent l'importance et la qualité de l'émission, qui a su créer un lien unique avec la francophonie à travers le monde. De nombreux témoignages mettent en avant le caractère fédérateur et enrichissant de l'émission, ainsi que le talent d'Emmanuel Khérad en tant qu'animateur. Certains expriment même leur indignation face à cette décision, qu'ils considèrent comme un désaveu de la culture et de la diversité francophone. Ils appellent à la réintégration de l'émission dans la grille des programmes, soulignant son rôle essentiel dans la diffusion de la littérature francophone et dans la création d'un espace de dialogue et d'échange pour les auteurs et les lecteurs.
La direction de France Inter confirme que "La Librairie francophone" prend fin, mais que la chaine continuera de soutenir la francophonie avec une nouvelle émission dédiée à la littérature francophone, en collaboration avec ses partenaires des médias francophones publics. Dès la rentrée, les auditeurs pourront découvrir ce nouveau programme qui mettra en lumière la diversité et la richesse de la littérature francophone à travers le monde.
La Direction indique qu
’« Emmanuel Khérad a porté haut les couleurs de la littérature francophone pendant 17 ans à l’antenne. Il en a été un excellent ambassadeur » comme en témoigne
« la qualité des émissions qu’il a proposées aux auditeurs durant toutes ces années ».
Injuste profanation Sur France Culture, mercredi, Guillaume Erner a consacré son «
Humeur du matin » à la vandalisation du Mémorial de la Shoah à Paris. Dans la nuit de lundi à mardi, plusieurs dizaines de mains rouges ont été taguées sur le "Mur des Justes" à l'extérieur du Mémorial, et sur diverses façades du Marais, quartier juif historique de la capitale.
Dans son billet, Guillaume Erner confie :
« À mes yeux, il n’y a rien de plus sacré qu’un Juste. Ce sont eux qui ont permis aux trois quarts des Juifs français de survivre. Chaque famille juive a les siens, chez moi, ils sont anonymes comme cet homme qui a permis à deux petites filles de traverser la ligne de démarcation. Il en a fait très peu, il les a conduits de nuit au milieu de la forêt, puis il a dit à une fillette de 10 ans et à sa sœur de cinq ans "continuez, c’est tout droit". Il faisait noir, elles n’étaient pas habituées aux bruits que font les grands chênes la nuit, les grands chênes et leurs habitants, mais la grande a donné la main à la petite et elles ont survécu. L’une est même devenue ma mère. Cette histoire, on me l’a raconté des milliers de fois, et c’est pourquoi j’aime les forêts et les Justes. » A la suite de cette chronique, dans leurs messages, des auditeurs ont exprimé leur gratitude envers les Français qui ont sauvé des Juifs pendant la Shoah. D'autres ont salué l'humanité et la réflexion de Guillaume Erner, une auditrice le qualifiant même de « phare » dans un monde souvent sombre et d’« idéal d’humanité fraternelle ». Certains ont trouvé la chronique émouvante et courageuse, surtout dans un contexte où l'antisémitisme est présent. Enfin, plusieurs auditeurs ont simplement remercié Guillaume Erner pour son billet, soulignant sa subtilité et son juste discernement.
Emmanuelle Daviet
Médiatrice des antennes de Radio France
