Gaza et l’Iran : territoires interdits à la presse
Comment les journalistes racontent la guerre lorsqu’ils ne peuvent pas se rendre sur le terrain ? À la lecture des nombreux messages reçus sur la couverture du Proche-Orient, une question revient de manière insistante : comment travaillent les journalistes lorsque l’accès aux territoires concernés par la guerre leur est interdite ?
Cette interrogation est d’autant plus fondamentale que le journalisme repose avant tout sur le reportage : être présent sur le terrain, observer, enquêter, témoigner. Depuis le 7 octobre 2023, aucun journaliste étranger n’a pu pénétrer à Gaza. En Iran, la situation n’est guère différente : l’accès au pays pour la presse internationale est extrêmement limité, les visas très difficiles à obtenir, les déplacements surveillés.
Dans ce contexte, comment maintenir une exigence de rigueur journalistique, de vérification, de recoupement des sources ? Dans
le rendez-vous de la médiatrice sur France Inter, Franck Mathevon, directeur de la rédaction internationale de Radio France, est revenu sur les défis que représente la couverture de territoires devenus inaccessibles. Il a expliqué la manière dont les rédactions travaillent à distance avec leurs correspondants, comment se construisent les choix éditoriaux, et selon quels critères les angles de traitement sont définis.
Lors de cette émission, Thibault Lefèvre, correspondant à Jérusalem, a détaillé les moyens mis en œuvre pour entrer en contact avec des témoins ou des sources fiables à Gaza. Il a précisé les méthodes utilisées pour vérifier les informations à distance, les précautions prises pour protéger les sources locales, et la frustration ressentie face à l’impossibilité de se rendre à Gaza.
La question de l’accès à l’information est restée entière lorsque les frappes américaines ont ciblé des sites iraniens. Cependant, malgré l’impossibilité de se rendre en Iran, des témoignages de civils iraniens ont pu être diffusés, lundi, dans la matinale de France Inter, grâce au travail de Béatrice Dugué. L’adjointe au service reportage était également invitée dans le rendez-vous de la médiatrice. Elle a partagé son expérience de recueil d’informations à distance depuis Téhéran, expliquant ses méthodes de vérification, la nécessité du recoupement et les précautions prises pour protéger ses sources dans un environnement marqué par la surveillance et les risques de représailles.
Cette émission a mis en lumière les conditions d’exercice d’un journalisme entravé par les contraintes d’accès au terrain, mais qui reste engagé dans sa mission : transmettre l’information, rendre compte des faits, malgré l’interdiction de se rendre sur place.
Tel-Aviv : être sur le terrain
De son côté, Farida Nouar, grand reporter à Franceinfo, était à Tel-Aviv lors de la riposte iranienne. Demain, à 13h20, dans le rendez-vous de la médiatrice sur Franceinfo, elle répondra aux auditeurs qui souhaitent comprendre dans quelles conditions elle exerce son métier dans un contexte aussi tendu. Ils s’interrogent aussi sur les précautions qu’elle et son technicien, Éric Audra, ont dû prendre pour assurer leur sécurité tout en poursuivant leur mission d’information. Certains souhaitent également savoir comment sont choisis les témoins ou les interlocuteurs interrogés sur place, ainsi que sur le climat dans lequel travaille une journaliste française en Israël, entre contraintes sécuritaires et pressions de différents ordres.
Farida Nouar reviendra sur les réalités concrètes de ce reportage : l'organisation quotidienne, les défis logistiques, les enjeux de sécurité, mais aussi la dimension humaine et émotionnelle de cette mission sur un terrain de guerre.
Grève : soutien massif des auditeurs "Nous ne sommes pas en mesure de diffuser l'intégralité de nos programmes habituels", indiquaient les messages diffusés sur les antennes hier, au premier jour d'une grève illimitée pour s'opposer à la réforme de l'audiovisuel public.
L'appel à la grève a été déposé par l'ensemble des organisations syndicales
"pour défendre Radio France, ses radios, ses métiers, sa production, ses formations musicales, et s'opposer au projet de holding de l'audiovisuel public”.
Les syndicats ont redit mercredi leur opposition au projet gouvernemental de rapprochement des entreprises de l'audiovisuel public, qu'ils considèrent comme "extrêmement dangereux", tant pour l'avenir des salariés que pour l'indépendance de l'information.
Plusieurs fois retardé, ce projet sera examiné à l'Assemblée nationale lundi et mardi. Il prévoit de créer une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France et l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un PDG.
Il est porté par la ministre de la Culture, Rachida Dati, déterminée à le faire adopter.
Le service de la médiation a reçu de nombreux mails de soutien d’auditrices et d’auditeurs en faveur de cette grève. Tous expriment un «
attachement » profond à Radio France et une «
inquiétude » partagée face au projet de holding de l’audiovisuel public. Ces messages traduisent une grande reconnaissance du travail accompli chaque jour par les équipes, qu’il s’agisse de l’information, des programmes, de la création radiophonique, de la musique ou de la transmission des savoirs.
Beaucoup saluent la «
qualité des antennes », la «
rigueur » et «
l’exigence journalistique », la richesse des contenus, et le rôle irremplaçable joué par la radio de service public dans un paysage médiatique de plus en plus soumis aux logiques de concentration et aux phénomènes de polarisation. Si quelques auditeurs regrettent de ne pas retrouver leurs programmes habituels, la plupart comprennent et soutiennent la mobilisation, estimant qu’il n’y a aucune raison de s’en excuser dans les messages diffusés sur les antennes. Ils se reconnaissent dans ce combat pour préserver une information pluraliste, une culture ouverte et un accès égal pour tous à une radio de qualité.
Ce soutien est précieux. Il rappelle que la radio publique n’est pas qu’un média : c’est un «
bien commun », auquel les auditeurs tiennent et qu’ils souhaitent défendre aux côtés de celles et ceux qui la font vivre chaque jour.
L’enquête "Brigitte Macron femme transgenre"
La semaine dernière, la cellule investigation de Radio France a consacré son enquête à la rumeur sur "Brigitte Macron femme transgenre", devenue virale aux Etats-Unis. Cette enquête, diffusée sur France Inter dans « Secrets d'info » et sur Franceinfo, a fait vivement réagir des auditeurs : leurs messages sont unanimement marqués par l’incompréhension, voire l’indignation.
Beaucoup dénoncent le choix même de traiter ce sujet, qu’ils jugent "
indigne du service public", estimant que consacrer une enquête à cette "
rumeur complotiste" revient à lui donner une "
visibilité injustifiée". Plusieurs auditeurs estiment que le simple fait d’en parler entretient le soupçon et «
remet une pièce dans la machine ». Ils regrettent que l’on consacre du temps à ce qu’ils perçoivent comme une "
affaire futile", au détriment de sujets jugés plus graves ou essentiels.
Certains reprochent à l’émission de ne pas avoir suffisamment déconstruit la fausse information. D’autres s’indignent de ce qu’ils considèrent comme un traitement «
sensationnaliste ». Quelques messages font aussi entendre une lassitude plus générale face à la médiatisation des rumeurs ou des thèses extrêmes, qui, selon eux, ne devraient pas être traitées avec autant d’écho sur une antenne de service public.
Le directeur des enquêtes et de l’investigation de Radio France, présentateur de « Secrets d’info », Benoit Collombat a tenu à répondre aux auditeurs :
“La vocation de « Secrets d’info » est d’enquêter sur tous les sujets, et donc par principe de ne rien s’interdire. Dans le cas présent, il ne s’agissait nullement de faire de la publicité à une rumeur, mais au contraire d’en démonter les mécanismes afin de comprendre comment une fausse information confinée au départ dans des cercles restreints a pu prendre une telle ampleur, jusqu’à s’exporter aux États-Unis auprès de réseaux proches du président américain, Donald Trump.
Laetitia Cherel qui signe l’enquête révèle notamment qu’un ancien conseiller à la sécurité nationale de Trump, lié à la mouvance conspirationniste QAnon et resté très proche du président américain, relaye cette rumeur, à l’unisson de plusieurs influenceurs ultra-conservateurs. Dès lors, le sujet prend une autre dimension. Notre intention n’était pas de traiter cette affaire sous un angle « people » ou sensationnaliste, mais (géo)politique, en explorant notamment l’importance de la transphobie pour les réseaux MAGA (Make America Great Again)."
Chronique de Sophia Aram : avis contrastés
Si
la semaine dernière les messages d’auditeurs étaient unanimement critiques à l’égard de la chronique de Sophia Aram intitulée « Les voyages forment la jeunesse », d’autres auditeurs lui ont manifesté, en nombre, un soutien très appuyé en début de semaine et leurs messages ont alors été publiés. Parmi ces auditeurs, quelques-uns, ont contesté le fait même que je publie des messages négatifs sur l’humoriste. Ils sont très peu à avoir formulé ce reproche mais j’ai souhaité
répondre ici avec clarté et transparence à leurs remarques.
Tout au long de la semaine, si les courriels reçus ont été plus contrastés, ils demeurent majoritairement très élogieux pour le travail de Sophia Aram.. De nombreux auditeurs ont tenu à exprimer leur soutien à la chroniqueuse, défendant sa liberté de ton et saluant un humour qu’ils jugent «
salutaire », «
lucide » et «
nécessaire » dans le climat actuel. Pour certains, sa critique des actions symboliques menées au nom de l’humanitaire, et notamment de la communication politique autour de la cause palestinienne, relève d’une «
mise à distance bienvenue » et d’un regard «
sans complaisance ».
Certains auditeurs apprécient que France Inter donne à entendre une pluralité d’opinions, y voyant le signe d’une radio ouverte et indépendante. D’autres, à la marge ces deniers jours, reprochent à Sophia Aram un «
positionnement trop idéologique », estimant qu’elle se détourne de l’humour pour se livrer à des attaques politiques ciblées, notamment contre LFI. Pour eux, ce type de chronique nuit à l’image d’un service public où les humoristes devraient, selon eux, rester en retrait d’engagements personnels trop marqués.
Dans l’ensemble, ces messages reflètent un débat vif, polarisé, mais également une forme de reconnaissance pour la diversité d’opinions accueillies à l’antenne, signe d’un attachement au pluralisme et à la liberté d’expression, y compris lorsqu’elle divise.
France Inter : les changements prévus à la rentrée
De nombreux auditeurs nous ont écrit ces derniers jours pour réagir aux changements annoncés dans la grille de rentrée de France Inter. Ces messages expriment avant tout une forme de «
tristesse », face à l’arrêt d’émissions jugées intelligentes et profondément utiles dans le paysage radiophonique. L’arrêt de programmes comme “Autant en emporte l’histoire”, “Blockbusters”, “En quête de politique”, “En Marge”, ou encore la réduction du temps d’antenne pour "La Terre au carré" et "Secrets d’info” suscite une certaine émotion.
Les auditeurs saluent la qualité de ces émissions, leur capacité à transmettre du savoir, à éveiller la curiosité, à ouvrir la réflexion. Ils expriment leur attachement aux voix qui les ont portées, aux chroniques engagées, à l’humour, à la rigueur intellectuelle et à la sensibilité qui s’en dégageaient. Beaucoup s’inquiètent aussi de ce qu’ils perçoivent comme une «
tendance à l’uniformisation » ou à la transformation de la radio publique vers des formats plus «
standardisés », au détriment de la «
singularité des contenus » et de la mission de service public.
Certains évoquent une forme de « vide » laissé par ces émissions, en particulier celles qui abordaient les enjeux environnementaux ou les grandes questions de société avec profondeur et nuance. D’autres adressent des mots de gratitude aux équipes et aux journalistes, tout en regrettant de ne plus pouvoir retrouver à l’antenne ces rendez-vous réguliers qui enrichissaient leur quotidien. Ces messages, souvent très personnels, révèlent combien certaines émissions de France Inter occupent une place essentielle dans la vie culturelle et intellectuelle de nombreux auditeurs.
Au sujet de la grille de rentrée, les premiers éléments communiqués par Adèle Van Reeth, directrice de la chaîne, et par la direction de France Inter sont à lire
en intégralité ici.
Voici cependant un aperçu des grandes nouveautés : à partir de la rentrée, la matinale sera prolongée d’une heure et s’intitulera désormais « La Grande Matinale », diffusée de 7h à 11h du lundi au jeudi.
Nicolas Demorand assurera la première partie de 7h à 9h, suivi de Sonia Devillers de 9h à 11h. Elle proposera à 9h20 une interview centrée sur les récits de vie qui mettra en lumière le parcours d’un anonyme ou d’une personnalité. De 10h à 10h30, un nouveau magazine culturel sera mis en place puis de 10h30 à 11h, Ali Rebeihi inaugurera un tout nouveau rendez-vous consacré à la vie quotidienne avec la participation des auditeurs. "Grand bien vous fasse" est maintenu en version hebdomadaire le vendredi.
Parmi les autres grandes nouveautés de la matinale : le journaliste Benjamin Duhamel assurera l’interview de 7h50 et co-animera avec Nicolas Demorand le Grand entretien de 8h20. À 7h55, Bertrand Chameroy succédera à Matthieu Noël qui a souhaité se recentrer sur son émission quotidienne Zoom Zoom Zen.
Sophia Aram, David Castello-Lopes, François Morel et Charline Vanhoenacker continueront à intervenir régulièrement. Lison Daniel et Philippe Katerine ont souhaité arrêter leur chronique.
La revue de presse sera confiée à Nora Hamadi, en provenance de France Culture. Elle succède à Claude Askolovitch qui a voulu arrêter ce rendez-vous après huit années à l’antenne.
Camille Crosnier, quant à elle, aura désormais un rendez-vous quotidien dédié à l’écologie à 6h45 au sein du 5/7 de Mathilde Munos.
À 14h, Stéphanie Duncan proposera chaque jour une chronique de 10 minutes dédiée à l’histoire. Elle posera chaque semaine une question sur un sujet historique à laquelle elle répondra de manière narrative en 5 épisodes, du lundi au vendredi. Les auditeurs ont été très nombreux à lui écrire à l’annonce de l’arrêt de son émission « Autant en emporte l’Histoire », une sélection de leurs messages est à lire dans cette Lettre. De même, nous avons reçu beaucoup de réactions à la suite des annonces concernant « La Terre au carré », les messages sont également publiés. L’émission de Mathieu Vidard démarrera à 14h15 et continuera de raconter les grands récits de l’écologie et de la science.
Passez un bel été avec Radio France
Nous vous souhaitons un très bel été à l’écoute des antennes, riches d’idées, de récits, de musique et de réflexion. Si vous souhaitez nous écrire, le service de la médiation reste ouvert tout l’été pour lire vos messages et transmettre chaque jour vos remarques auprès des chaînes concernées. N’hésitez pas consulter nos publications sur le site de la médiatrice, et nos réseaux sociaux pour découvrir les vidéos de notre série «
Les mots des voix », des portraits de journalistes et de producteurs de Radio France et leur lien avec la langue française, avec ce vendredi, dans cette Lettre, les vidéos de Florence Paracuellos, présentatrice du 8 heures de France Inter, Aurélie Charon, productrice de “L’expérience” et de “Tous en scène” sur France Culture, Yaël Goosz, journaliste politique à France Inter et Jean-Rémi Baudot, présentateur de Franceinfo soir .
La Lettre de la médiatrice revient à la rentrée.
Emmanuelle Daviet
Médiatrice des antennes